La presse officielle sous l’Occupation
Lors du salon du livre de la 2ème Guerre mondiale le 8 mai 2013 à Tercé, Monsieur Jean-Marie Augustin professeur honoraire d’histoire du Droit à l’Université de Poitiers apporte, au cours de sa conférence, les preuves irréfutables de la collaboration de la presse locale avec l’occupant.
Les principaux journaux de la Vienne sous l’occupation sont « l’Avenir de la Vienne » qui existait déjà sous la 3eme république dont le siège se trouvait 26 rue Carnot à Poitiers, et le « Centre-et-Ouest » journal conservateur prônant l’ordre social installé 5 rue Victor Hugo. Mais on pouvait également lire la « Dépêche du Centre », « la France de Bordeaux » ainsi que cinq hebdomadaires : « L’écho de Châtellerault », « La Gartempe » à Montmorillon, la « Gazette de Loudun, « L’Echo de Civray », et « Le Réveil civraisien » supprimé en avril 1942 par les Allemands.
Dès le 30 juin 1940 « L’Avenir de la Vienne », le plus collaborationniste des journaux, souligne la grande chance de la France de collaborer avec l’Allemagne nazie.
Le 31 août 1940, sous la plume d’Henri Tournier son directeur, est louangée la main tendue de Montoire dans un long plaidoyer préconisant la loyauté envers l’occupant. Il faut rappeler ici les règles de la censure imposant de ne nuire en rien à l’image de la Wehrmarcht auxquelles étaient soumis les journalistes à cette époque. Ils devaient se plier aux exigences de la Propagandastaffel , brigade de propagande, installée 18 rue St Denis à Poitiers.
Par conviction, loyauté, lâcheté ou encore appât du gain tous ces journalistes vont collaborer et voir ainsi leur salaire doublé.
Ceux de « Centre-et-Ouest » restent un peu en retrait.
Cependant le 13 juillet 1940 Jean Maupertuis fait l’apologie du programme de la propagande de Pétain dans laquelle il exalte le retour à la terre, la famille, la patrie et l’ordre nouveau. Il apprécie notamment la rentrée de Dieu dans la cité et dans l’école, l’acceptation de la discipline et du travail, le goût de l’initiative privée, le sentiment de la pudeur chez les femmes.
Raymond Duplantier, ancien sénateur de la Vienne, reprend dans un article l’hommage à ce nouveau régime qui remplace la faiblesse de la démocratie par la force d’un ordre nouveau. La mystique du chef idéal et providentiel est célébrée par tous les journaux du département. Une banderole « Révolution Nationale » est déployée sur la façade du siège de « L’Avenir de la Vienne ». Le message est clair. La Révolution Nationale de Vichy doit faire disparaître la Révolution française.
La France du « bon sens » va être promue, Vichy devient la capitale de « l’hygiène sociale ». « Un vin nouveau pétille dans nos verres , un sang nouveau coule dans nos veines ».
Tout acquise au nouveau régime, la presse locale se réjouit des nouvelles lois remettant en cause la naturalisation des étrangers, exacerbant ainsi la xénophobie.
Il faut rappeler que Poitiers a accueilli au cours de l’exode de nombreux réfugiés venus du Nord Mosellans, Belges mais aussi du Sud des Espagnols chassés par le franquisme. Pour les journalistes, Poitiers devient une ville dépotoir et ils n’hésitent pas à écrire :
Seigneur, libérez-nous des assaillants, juifs évadés de Pologne, Rouges venus d’Espagne.
En 1941, le docteur Guérin prisonnier en Allemagne est libéré . De retour à Poitiers il adhère au PPF (Parti populaire Français de Doriot) dont il devient secrétaire. Il écrit dans « l’Avenir de la Vienne » en se présentant comme socialiste chrétien . En novembre 1941 il se félicite de la création de la LVF (Légion des Volontaires Français) et affirme son populisme en brocardant les élites de la république.
En 1943 il amalgame juifs et communistes incitant ainsi à la haine raciale et justifiant l’élimination de ces terroristes criminels. Des étudiants s’introduisent chez lui pour récupérer des dossiers dangereux pour les résistants . Guérin les surprend, un coup de feu est tiré et les étudiants le tuent.
Le préfet Bourgain condamne ce crime perpétré par de lâches terroristes communistes.
A Niort des lycéens organisent une collecte pour fleurir les tombes d’aviateurs alliés. La Villedieu dans un article condamne cette initiative en vilipendant les aviateurs alliés assassins des Français, pourvoyeurs par parachutages de criminels terroristes.
A la Libération pour leur collaboration irréfutable à l’idéal nazi et à la Révolution Nationale de Vichy, ces journalistes furent traduits devant la Cour de Justice et la Chambre civique mises en place à Poitiers de 1944 à1947.
La Villedieu, pseudonyme de Georges Moinard, rédacteur en chef à « L’Avenir de la Vienne » fut condamné à 7 ans de travaux forcés.
Henri Tournier directeur de « L’Avenir de la Vienne », fut condamné à 10 ans de travaux forcés.
Pierre Lucquiau propriétaire de « L’écho de Civray » fut condamné aux travaux forcés à perpétuité.
Tous bénéficièrent très vite d’une libération conditionnelle.
En 1953, ils furent amnistiés.
D’après des extraits de la conférence de Monsieur Jean-Marie Augustin.
Rédigé par Louis-Charles Morillon