Les arrestations du 23 juin 1941

Comprendre le pourquoi de ce grand « coup de filet », c’est mesurer avec exactitude et objectivité la haine des nazis et de leurs complices vichystes à l’encontre des communistes et leur volonté de les anéantir.

René Amand, déporté et mort à Auschwitz-Birkenau

Les arrestations du 23 juin 1941

Après la signature entre l’Allemagne et l’U.R.S.S. du pacte de non- agression le 23 août 1939, le Président du Conseil, Daladier, fait saisir le journal du Parti Communiste Français (P.C.F.), « l’Humanité », qui justifie ce pacte présenté comme un moyen de détourner l’agressivité jusque là canalisée contre l’U.R.S.S. par les démocraties occidentales.
Ensuite, le gouvernement Daladier dissout par décret du 26 septembre 1939 le Parti Communiste Français qui n’a pas dénoncé le pacte germano-soviétique. Devenu de ce fait clandestin, après les arrestations opérées parmi ses militants, puis parmi ses députés, et après la dissolution de plus de 300 conseils municipaux et la remise en cause (au nom de la Défense Nationale) d’un certain nombre d’acquis du Front Populaire par le gouvernement, le P.C.F. doit reconstruire une structure élémentaire d’organisation.
Après la défaite de juin 1940, la signature de l’armistice le 22 juin avec l’Allemagne nazie qui impose à la France l’occupation de plus de la moitié de son territoire, la situation politique se retrouve profondément bouleversée : abolition de la République, droits de presse supprimés, promulgation des lois anti-juives.
Après l’appel à la résistance du général de Gaulle le 18 juin 1940, la résistance non communiste s’organise et s’enracine au cours de l’hiver 1940/1941. Malgré les consignes d’une partie de la direction du P.C.F. de ne pas engager d’actions contre l’occupant, un grand nombre de militants communistes se mobilisent pour créer l’« Organisation Spéciale » (O.S.) dès octobre 1940. Ils engagent l’action contre l’occupant nazi (distribution de tracts, premiers sabotages).
Après des contacts avec la résistance non communiste, la création « du Front National (1) » en mai 1941 entraînera la transformation de l’ « Organisation Spéciale » du Parti Communiste en « Francs-Tireurs et Partisans » (F.T.P.).

Le tournant du 22 juin 1941

Fidèle au programme annoncé dans son livre « Mein Kampf », Hitler applique ses théories hégémoniques en envahissant l’U.R.S.S. le 22 juin violant le pacte de non-agression germano-soviétique.
Il espère de ce fait réaliser son grand dessein qui consiste à éliminer la vie à l’Est qui selon lui « n’a aucune valeur », à s’octroyer le territoire soviétique ainsi que ses immenses richesses et d’éliminer son ennemi idéologique.
Avant l’invasion de l’URSS par les 150 divisions de l’armée hitlérienne, le régime de Vichy, conformément à sa politique de collaboration, avait fourni à l’occupant les listes des dirigeants et militants communistes, des responsables syndicaux.
Cette attitude relève aussi bien de l’anticommunisme de Vichy que de la stratégie de la collaboration dans le cadre d’un nouvel ordre européen : face à l’occupant l’Etat français veut affirmer son existence en assurant lui-même la répression de ses ressortissants.

Au matin du 23 juin 1941, 30 patriotes poitevins inscrits sur ces listes sont arrêtés pour la plupart par des policiers français. 1000 personnes seront arrêtées le même jour dans toute la France en application du programme nazi de répression qui avait pour nom : « Aktion Théodérich ».
Ce plan répressif, par sa rapidité d’exécution, dès le lendemain de l’invasion de L’URSS par les troupes d’Hitler, a assuré à ses auteurs nazis et complices vichystes son efficacité, ne laissant aucune chance aux militants pourchassés de passer au travers des mailles du filet.
Les 30 patriotes résistants arrêtés sont dans un premier temps internés à la caserne de la « Chauvinerie », à Poitiers, occupée par l’armée allemande. Trois autres personnes arrêtées entre le 24 et le 26 juin 1941, emprisonnées dans la Vienne, connaîtront des itinéraires répressifs différents.
Les internés de la « Chauvinerie » sont transférés au camp d’internement de Compiègne ; les trois femmes de ce groupe sont internées ensuite à Romainville d’où elles sont libérées : Simone Boisson, Isabelle Douteau et Jeanne Massé.
Raymond Légeron sera libéré après emprisonnement à la Pierre Levée à Poitiers.
Henri Faillet (photo ci-dessous) est libéré après hospitalisation au Val de Grâce à Paris.
De Compiègne sont libérés : René Guilgault, Imbert, Perrault et Edouard Proust.
Les autres, internés à Compiègne, seront tous déportés.

Un premier groupe de 14 est déporté à Auschwitz. 3 reviendront. Ils ont fait partie du convoi des 1175 déportés résistants parti de Compiègne le 6 juillet 1942, dit « Convoi des 45000 » en référence à leur numéro matricule au camp, dont seulement 119 sont rentrés.
Les 3 qui sont rentrés en France sont : Louis Cerceau, Raymond Montaigut et Maurice Rideau.

Les 11 autres, morts au camp d’Auschwitz-Birkenau sont :

René Amand, Paul Bailly, Félix Bedin, Georges Fouret, Charles Limousin,  Alfred Ménien, Jacques Moron, André Perrin,
Auguste Picard, Marcel Pilorget et Alphonse Rousseau.

Un deuxième groupe de 7 personnes est déporté au camp de Sachsenhausen :

Marcel Couradeau, Emile Lecointre, Aristide Pouilloux et Alfred Quinqueneau seront libérés en mai 1945. Les 3 autres : Emile Boisson, Alfred Giraudeau et Léopold Saillier sont morts au camp.

Le dernier groupe de 3 résistants est dirigé vers Buchenwald. Les 3 mourront au camp : Emile Grandin, Léopold Huctin et Derma Rocher.

(1) Il s’agit là du Front National pour la libération et l’indépendance de la France qui ne peut se confondre avec le « Front National » raciste, antisémite et xénophobe de J .M. Le Pen.

         Texte de Jean et Louis AMAND

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